Claire Babet

Née en 1969, aux Lilas.
Diplômée de l’école nationale et supérieure des Arts Appliqués et des Métiers d’Art en 1990 (Paris). Enseigne le vitrail au lycée Lucas de Nehou, entre 1995 et 1998, puis rejoint l’atelier de Michel Petit. Depuis 2000, elle dirige le nouvel atelier avec Stéphane Petit. Sa recherche de peintre qu’on peut voir avec Ondes (2000), Trilogie (paravent, 2001) se mène aussi sur toile. Créations de vitraux à Bamako (Mali, 1999), à l’UNEDIC de Paris (Orange Amère, 1999), à l’église d’Autheuil-en-Beauce (Eure-et-Loir), 2001 et à l’usine Novo Nordisk de Chartres (2005). Expose depuis 1990. Primée au Salon d’Automne (prix des Arts Décoratifs) en 2005, et à plusieurs reprises par la Société d’Encouragement aux Métiers d’Art.

En mai 2005, Claire Babet achève le grand ensemble réalisé pour l’unité de production Novo Nordisk de Chartres (70 m2). Le projet est mené tandis que l’usine est en construction, guidé par cette question : « comment mettre l’usine en couleur et comment rythmer les immenses baies, conçues pour apporter le plus de lumière naturelle possible dans le lieu de travail ? ». Les verrières monumentales suivent de longues passerelles, aux effets de perspectives et de déformations optiques assez forts, et aux conditions d’éclairement variables selon les zones. Les architectes et Claire Babet ont eu une approche commune. « Les commanditaires, danois, sont conscients de l’apport d’une œuvre d’art dans le quotidien du travail. Ils ont un goût pour les éléments naturels et désiraient que le vitrail n’attire pas trop l’attention de l’extérieur, que les éléments architecturaux s’intègrent les uns aux autres avec discrétion. Ils font confiance à l’artiste, à sa démarche et à ses compétences. Je ne voulais pas que le vitrail s’impose, mais au contraire qu’il soit fondu dans le bâtiment ».
Claire Babet choisit de composer une frise au sein des murs-rideaux, rythmée et unifiée par un module, ici signe ternaire, décliné et déployé dans toutes ses variations par la peinture (grisailles, émaux, céments sur verre industriel). La coloration du module tient dans les rapports des jaunes, ocres, orangés et bleus, « ces rapports que je sens sereins et gais ».
« Les maquettes, c’est un peu une rencontre. Il y a le lieu et la lumière qu’on y projette ». Dans le projet d’ensemble conçu pour l’ancienne collégiale de Bueil-en-Touraine (Indre-et-Loire) en 2005, le plan carré lui suggère de concentrer les effets de lumière. Par exemple, « pour casser un très fort contre-jour, adoucir la lumière par l’apport de grisailles, de zones d’ombres, qui font passer le mur dans la fenêtre ». Les graphismes et colorations des matières propres à l’édifice (nature des décors et des surfaces) sont intégrés à l’élaboration des maquettes, nourissant de l’intérieur la création.

« Je réagis beaucoup à l’ambiance lumineuse et à l’échelle. Je regarde la configuration, la hauteur, l’entrée de lumière, je prends les sensations. Ma démarche est très instinctive, j’ai des sensations, non pas des images. Je pense réellement de manière abstraite, c’est le langage qui me convient. Je peux traduire un élément iconographique ou symbolique par une coloration ou un signe abstrait ». Le sujet ou le sens de l’œuvre étant « suggestion », et non discours, l’opposition entre abstrait et figuré n’a plus lieu d’être.

« J’aimerais bien que mes œuvres soient lues comme les pierres de rêves chinoises ; elles libèrent l’imaginaire » (appelées en Chine « tableaux de pierre », ces pierres polies, parfois légèrement encrées, sont, entre autres, des supports de méditation qui recèlent d’extra­ordinaires polychromies). « Je travaille dans cette optique. J’aimerais que les gens puissent y voir à chaque fois autre chose, développer d’autres liens dans leur imaginaire, qu’ils aient cette sensation de pouvoir se promener, voyager ».
« Chartres est un bassin de création. La cathédrale est une création des hommes, je m’en sens proche humainement ; il y a des liens d’intimité – presque de complicité -, d’humilité et de respect envers cette somme de maîtrise, d’expérience et de talent. Cela permet aussi d’espérer. Pouvoir prendre soin d’un édifice, accepter ses métamorphoses, savoir le respecter et pouvoir l’amener vers autre chose, et nous projeter, nous aussi, en création.
Par elle, s’inscrire dans le temps, laisser une trace du savoir que l’on a su observer et retransmettre. Une fréquentation de ce patrimoine exceptionnel permet vraiment de construire son cheminement ».