Gérard Lardeur

1931-2002, Paris. Formé à l’école nationale des Arts Décoratifs, l’école nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris. Fils du maître verrier Raphaël Lardeur (Paris), il réalise ses premiers vitraux en 1953 pour Fonches-Fonchette (Somme). En tant que sculpteur, il expose à partir de 1958. Chargé de cours en Sorbonne de 1978 à 1980. Gérard Lardeur nous laisse une œuvre considérable de vitraux, avec environ soixante-dix sites religieux recensés à ce jour en France, dont de nombreux ensembles : Lille (Nord), couvent des dominicains, 1957 ; Montrouge (Hauts-de-Seine), église Saint-Luc, 1966 ; Vaucelles (Nord), 1975-1989 ; Brec’h (Morbihan), chartreuse, 1971 ; Cambrai (Nord), cathédrale Notre-Dame-de-Grâce, 1979-1982 ; Strasbourg (Bas-Rhin), église Saint-Thomas, 1984-1985 ; Charleville-Mézières (Ardennes), église Saint-Liè de Mohon, 1986 ; Trédrez-Locquémeau (Côtes-d’Armor), église, 1989-1990 ; Langonnet (Morbihan), église Saint-Pierre-Saint-Paul, 1995 ; Rennes (Ille-et-Vilaine), la chapelle Saint-Yves, 1998 ; Saint-Sauveur (Finistère), église, 1999 ; Matha (Charente-Maritime), église Saint-Hérie, 2000-2001 ; Bords (Charente-Maritime), église, 1997 ; Bannalec (Finistère), église, 2001-2002 ; Calais (Pas-de-Calais), cathédrale Notre-Dame, 1976-2001 ; Biron (Dordogne), église, 2005 ; Saint-Just-Luzac (Charente-Maritime), église, 2005-2006. Ses vitraux sont réalisés à l’atelier de Gerd Fanslau à Chartres.

Pour Gérard Lardeur le vitrail doit respecter l’édifice, ses bâtisseurs, ses fidèles passés, présents et à venir. Le vitrail appartient à tous, une création implique donc des devoirs, une dimension politique placée à l’aune de « la dignité de chacun ». Ses œuvres nous interrogent sur la possibilité de l’expression artistique dans le vitrail, située au-delà de la résolution d’un problème de lumière, celle de la liberté de créer, le risque de la prendre et la responsabilité qui s’en suit.
« Sculpter la lumière », expression qu’on lui doit, définit son travail, l’écriture cinétique qui lui est propre et qui met en mouvement l’ensemble des acteurs du lieu ; le réseau de plomb occupe pleinement le plan, ouvre des perspectives, des volumes qui allègent ou font masse, des formes symboliques (cercle, angle), allant jusqu’à l’emploi d’éléments qui prolongent la composition des baies : voiles, miroirs, plaques d’inox, laine de verre, grilles, sculptures. La transparence est une finalité dont il travaille la texture, la « couleur » (contrastes de matières de verre armé industriel et du verre antique très bullé, par exemple), notamment dans le rapport blanc-noir-rouge, le premier dont l’homme indoeuropéen a pu se servir (chapelle Saint-Yves, Rennes).

« J’entends par sculpture ce qui se dit par la transformation d’un matériau, et vitrail ce qui se dit par l’utilisation d’un matériau écran ». « En sculpteur, mon thème essentiel est matière. En verrier, mon thème essentiel est matière. Dans les deux cas, la finalité est transparence absolue. Par matière il faut entendre texture de la lumière, et y ajouter l’irisation, l’opacité, le poids, la masse, le toucher, le vide et le plein, le feu, le bruit, le silence ». « La lumière organise la parole, précise la perception et, par son interruption volontaire, devient une re-création permanente, ou plutôt devient l’instrument d’une re-création ».

« La lumière est un appel. L’homme n’a pas accès au tout, l’importance de l’invisible relève moins de l’action de forces inconnues que d’un manque de dynamique du regard. Chaque partie a un sens, mais l’ensemble des sens ne donne pas forcément le sens du tout. C’est bien le problème de la sculpture qui laisse toujours une inconnue à l’interrogation du regard. La lumière, en revanche, a une source, un centre qui rayonne et donne forme à tout ce qu’elle touche. La lumière détournée donne un second jour… puis un contre-jour ».
« En conceptualisant dans le langage plastique actuel tel qu’il est, excluant toute passion, sinon toute foi, il est possible d’esquiver le mystère, mais le dialogue avec le visible, comme celui avec l’invisible, reste entier ». « Le choix et l’ordonnance des formes permettent de deviner l’invisible. En utilisant un miroir, nous ajoutons au volume un second qui, vu à l’envers, devient son contraire et nous permet de voir le tout. L’objet d’origine définit la source d’un espace qui le dépasse. Le signifiant devient prétexte à un autre signifiant ».
« C’est la relation entre l’autre et le regard qui le cherche. C’est la relation entre la présence et le regard qui la perçoit ».